每日法语听力

当前播放

马克龙访华:西安大明宫演讲 (1)

Monsieur le Vice-président de l'Assemblée nationale populaire de Chine. Monsieur le Vice-gouverneur, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les ministres et les parlementaires, Monsieur le Président.

Je suis très heureux aujourd'hui d'avoir l'opportunité de m'exprimer devant vous après cette matinée passée à vos côtés dans cette magnifique ville de Xian. Depuis longtemps, la Nation française s'est contemplée au miroir de la Chine, en elle se sont agrégées au fil des siècles la pensée, la poésie, l'art, mais aussi une réflexion sur la guerre, le pouvoir, la vie humaine et tout un imaginaire d'aventures et de voyages autour de marchandises extraordinaires et de découvertes singulières.

C'est la Chine des marchands, découvrant avec Marco Polo, et à sa suite les usages et les trésors d'une civilisation méconnue et mystérieuse, empruntant ces routes de la soie, auxquelles vous donnez aujourd'hui une signification et une grammaire nouvelles. Il faut imaginer les caravanes arrivant dans l'oasis de Dunhuang, trésor de votre civilisation, au milieu des montagnes de sables qui résonnent.

Dans le lot de denrées, de marchandises, se chargeaient, comme Marguerite YOURCENAR le fait dire à Hadrien, un certain nombre de pensées, de mots ou de coutumes, qui peu à peu s'empareraient du globe plus sûrement que les légions en marche. Ils rapportaient de leurs pérégrinations des objets et des matières inconnues, dont aussitôt la France et d'autres pays européens raffolèrent, non pas pendant le temps éphémère d'une mode, mais avec l'intensité d'une découverte venant s'inscrire dans notre patrimoine propre. Il n'est guère de château royal qui ne comporte son salon chinois, guère d'artistes, d'artisans, d'ingénieurs qui ne se soient trouvés fascinés par les styles et les techniques venus de Chine.

Cela perdure encore aujourd'hui, car la Chine est ce pays d'inventeurs et d'ingénieurs qui sans cesse inventent l'avenir. Cette Chine des marchands, c'est aussi celle des diasporas, qui, à travers le monde, ont progressivement transformé les villes, et dont la France s'honore, qui a la première diaspora chinoise d'Europe. C'est la Chine des guerriers, dont je viens de voir dans la nécropole les statues de terre cuite alignées, nourries de symboles et de respect pour la figure du soldat chinois, une figure autour de laquelle se construit l'art chinois de la guerre, porté à son sommet par Sun TZU, connu des Européens depuis le 18ème siècle, et vont encore puiser les élèves de nos écoles militaires.

Nous partageons ce même respect du soldat, ces honneurs dus aux militaires et à ceux qui tombent pour leur patrie ou dans un juste combat, je rends hommage ici à tous vos compatriotes, inhumés au cimetière de Nolette, dans cette terre de Somme qui m'est chère ou dans d'autres lieux. Ce n'était pas simplement des soldats, mais pour la plupart d'entre eux, ce n'était pas des soldats du tout, mais des travailleurs chinois, venus soutenir l'effort de la France pendant la première guerre mondiale.

Ils furent plusieurs milliers affectés à des tâches arides dans les mines, les tranchées, les usines, auprès des soldats, des malades, du peuple français. Certains sont restés fonder une famille, d'autres sont repartis, et beaucoup aujourd'hui reposent sur notre sol. A quelques mois de la commémoration de la fin de ce conflit mondial, je veux que nous nous souvenions d'eux, qui furent nos frères dans ces heures tragiques. C'est aussi la Chine des écrivains et des penseurs, celle que voici presque 450 ans découvrit la première mission jésuite.

Celle que depuis nous ne cessons, nous, Français, de scruter et d'interroger, c'est que depuis le début, nous percevons dans la manière de penser chinoise une vision du monde, ancrée dans d'autres croyances, d'autres concepts que les nôtres. Et cependant, dans cette différence même, nous trouvons depuis plus de 200 ans de quoi remettre en cause nos propres croyances, mais aussi de quoi croire en une communauté humaine, car bien souvent, cette différence est convergence, ce sont nos poètes qui l'ont le mieux sentie. Ainsi votre poète Wang Bo selon lequel quelqu'un qui vous comprend même au bout du monde, est comme un voisin ou Victor-Segalen, venu chercher en Chine les briques et les tuiles de sa poésie et découvrant ici-même, à Xian, l'odeur fade et riche des siècles enfouis.

Ainsi, Paul Claudel tirant ses vers d'une traduction minutieuse, personnelle profonde du livre de Jade. Ainsi, Saint-John Perse, écrivant « Anabase » , d'après des poèmes chinois, et je surprendrais sans doute nombre de Français en rappelant ici que le rouge et le Noir de Stendhal, dont un exemplaire ne quitte jamais mon bureau, a connu chez vous à Caen plus de 20 traductions depuis 1947. Et que depuis de longues années, vous comptez des traducteurs de très haut niveau, qui inlassablement, traduisent, interrogent, publient notre littérature. Et nous avons vu il y a quelques instants des religions qui nous sont familières, revisitées par ce dialogue permanent et ce syncrétisme dont la Chine a le secret. Rien ne remplace ce contact fécond entre nos deux langues, nos deux univers, nos cultures, preuve constamment apportée que le dialogue est possible, et surtout qu'aucune de nos cultures n'est un bloc. Il y a plusieurs théories sur la Chine.

Et lorsqu'on vient d'Europe et qu'on cherche à comprendre, et se frayer un chemin, il y a ceux qui vous disent : c'est un continent incompréhensible, en Chine, on ne rentre jamais, c'est bloc contre bloc, et on fait semblant de se frayer des passages les uns et les autres feignent en quelque sorte de se comprendre. Je ne crois pas, pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, à cette théorie. Il y a des intraduisibles, il y a des gouffres qu'il nous faut parfois réduire, mais il y a toujours des voies et des chemins, fruits de ce dialogue, il y a toujours les périphrases que nous devons trouver, pour progressivement circonscrire ces intraduisibles et trouver les chemins qui nous lient, parce que la culture chinoise comme la culture française, doivent s'appréhender dans toutes les nuances de leur évolution historique, de leur sensibilité intellectuelle, esthétique, politique, géographique, et parce que c'est notre histoire même, c'est ce que démontre notre admirable école de Sinologie, de CHAVANNES à VANDERMEEERSCH, de Marcel GRANET à François JULLIEN, de Henri MASPERO, à Anne CHENG, en passant par tant d'autres décrypteurs de toutes les complexités de la pensée chinoise.

下载全新《每日法语听力》客户端,查看完整内容
点击播放